Côte d’Ivoire: l’idée d’un troisième mandat de Ouattara passe mal
juin 4, 2018 :
Alassane Ouattara pourrait briguer un troisième mandat en 2020. Sans le dire clairement, le président ivoirien, dans un entretien à Jeune Afrique, a laissé entendre que la Constitution modifiée en 2016 l’autorise à rempiler deux nouveaux mandats. De quoi déchaîner une avalanche de réactions à travers la Côte d’Ivoire, notamment dans les rangs de l’opposition.
C’est une déclaration qui défraie la chronique en Côte d’Ivoire depuis dimanche. Pour Alassane Ouattara, si la Constitution de son pays limite à deux le nombre de mandats présidentiels, sa réforme en 2016 remet les compteurs à zéro. Pascal Affirmé Nguessan, le patron du Front Populaire Ivoirien (Foi), parti fondé par l’ancien président Laurent Gbagbo, M. Ouattara tient une position peu correcte.
« C’est une position qui n’est pas intellectuellement et politiquement correcte, acceptable, dans la mesure où le chef de l’Etat sait bien que la volonté qui est exprimée à travers la limitation des mandats : en Côte d’Ivoire, comme de façon générale à l’heure actuelle en Afrique, c’est qu’un citoyen ne puisse pas faire plus de deux mandats. C’est ça qui est la volonté politique qui est transcrite par la loi, par la Constitution ».
Le candidat malheureux à la présidentielle de 2015 estime qu’un nouveau mandat en 2020 pour Alassane Ouattara violerait la Constitution et son esprit : « Monsieur Ouattara a fait deux mandats, je ne comprends pas comment il peut imaginer un troisième ou un quatrième mandat. Ce serait même une violation flagrante de la Constitution et de la volonté exprimée par les Ivoiriens à travers la Constitution. On ne peut pas dire que l’application de la loi dépend des circonstances, des situations ou des ambitions des uns et des autres. La loi, c’est la loi. Et il n’est pas le seul Ivoirien capable de maintenir la paix et la stabilité du pays, d’ailleurs il ne l’a pas fait. Monsieur Ouattara ne peut pas être candidat. Et vouloir le faire, c’est chercher encore à créer l’instabilité et les affrontements en Côte d’Ivoire ».
Dans les rues d’Abidjan, c’est l’incompréhension totale. Des jeunes interrogés par France 24 se disent surpris par ces propos du président. Certains de ces jeunes, pour la plupart des étudiants, voient en cette volonté du successeur de Gbagbo, les germes de la réédition des violences post-électorales de 2010-2011 qui avaient fait plusieurs milliers de victimes et dont la Côte d’Ivoire ne s’est toujours pas encore remis, malgré les apparences.
En tout cas, cette déclaration d’Alassane Ouattara intervient dans un contexte de tractations pour transformer la coalition au pouvoir, le RHDP, en un parti politique en vue de dégager un candidat unique dans la perspective du scrutin de 2020. Un candidat unique qui pourrait aussi se nommer Henri Konan Bedie ou Guillaume Kigbafori Soro.
Pendant ce temps, c’est le président du Niger, Mamadou Issifou, qui s’attire la sympathie de la jeunesse de son pays et d’Afrique, en réitérant lundi qu’il ne briguera pas un troisième mandat en 2021. Sous réserve bien entendu qu’il ne fasse pas volte-face in extremis comme c’est de coutume sur le continent.