Crise togolaise – France, CEDEAO, pouvoir et C14 : un vrai cocktail indigeste

L’appel de la C14

«Togolaises et Togolais des villes de Mango, Bafilo, Sokodé, Lomé, Tsévié, Atakpamé et Kpalimé, Organisations de défense des droits de l’Homme, associations de presse, syndicats et associations de la société civile, travailleurs des secteurs publics et privés, revendeuses des marchés, taximen, zémidjans, étudiants, munis de drapelets togolais, une fois encore, soyons tous au rendez-vous les 13, 14, 21, 28 et 29 juillet 2018 aux lieux des meetings pour recevoir les informations appropriées au renforcement de votre détermination ».

C’est par ces mots que la Coalition des 14 partis de l’opposition togolaise a appelé mardi à la reprise de ses manifestations, pour exiger le retour à la Constitution originelle de 1992, les réformes institutionnelles, la révision du cadre électoral y compris le droit de vote des Togolais de la diaspora, la libération des manifestants arrêtés dans l’exercice de leur droit constitutionnel et la levée de l’état de siège de fait dans les villes de Mango, Bafilo, Sokodé, Tchamba, Kara et des quartiers de Lomé, l’arrêt immédiat des rafles dans les quartiers de la capitale et sur toute l’étendue du territoire et le retour des réfugiés et des déplacés.

Boukpessi et le « risque d’une crise institutionnelle »

L’appel à manifester à Sokodé, Bafilo, Tchamba et Mango, quatre villes en état de siège de fait, va-t-il être couronné de succès ? On ne connait pas pour l’heure la position du ministre en charge de l’Administration territoriale. En revanche, on sait ce que pense Payadowa Boukpessi des élections législatives. « Nous courons le risque d’une crise institutionnelle si nous n’organisons pas les élections législatives au Togo avant la fin de l’année 2018 », a déclaré le ministre samedi lors du symposium de la jeunesse organisé à Kara, en marge de la fête traditionnelle Evala.

Ces propos de Payadowa Boukpessi sonnent dans les oreilles des opposants au pouvoir de Lomé comme la « confirmation de la volonté du régime de faire un passage forcé ». « Ce n’est pas étonnant que Boukpessi dise ces choses, puisque cela va dans le fil droit de ce qu’a déjà dit la Cour Constitutionnelle d’Aboudou Assouma aux ordres du prince », a analysé un des responsables de la Coalition.

Qu’est-ce donc qu’une crise institutionnelle ? Me Zeus Atta Messan Ajavon persiste et signe : « le vide constitutionnel n’existe pas ! ». Le ministre et le professeur de Droit parlent-ils de la même chose ?

Macron, le statut quo et le Nigeria

S’exprimant récemment sur la situation politique togolaise, Emmanuel Macron a indiqué que « le statut quo n’est plus possible pour le Togo ». Un bout de phrase interprété par chaque camp selon que cela l’arrange. Pour les partisans du pouvoir, le statut quo signifie la crise actuelle née le 19 août 2017 et « alimentée par l’opposition ». Tandis que dans les rangs de l’opposition, ces propos du président français résonnent comme la « lassitude d’un chef d’Etat français de voir la même famille biologique diriger tout un pays pendant un demi-siècle ».

En tous les cas, le président français compte bien proposer un schéma de sortie de crise qui implique le Nigeria en pole position. “Le président (Muhammadu, ndlr) Buhari entre en période électorale,  et je pense que le Nigeria aura,  après cette période électorale,  un rôle important à jouer à la solution de cette crise “, avait-il déclaré ajoutant que “la France viendra en soutien de ces solutions portées par les chefs d’État africains et l’Union africaine“.

Un politologue togolais, qui a requis l’anonymat, coupe la poire en deux : « Par cette déclaration, Emmanuel Macron veut juste rappeler au Nigeria que la France a la main sur la crise togolaise. Une façon d’éteindre les déclarations tapageuses de Buhari et lui dire que le Nigeria ne peut agir dans la crise togolaise que dans le périmètre que la France aura aménagé pour les acteurs régionaux ». « Entendons-nous bien, les élections au Nigeria, c’est en 2019. Est-ce à dire que les Togolais vont devoir attendre d’ici là ? Moi je pense que la solution à la crise togolaise n’est pas extérieure. Il faut nécessairement une stratégie interne qui sera appuyée par l’extérieur », propose-t-il.

Vivement les recommandations de la CEDEAO !

Les 30 et 31 juillet, les chefs d’Etat et de gouvernement de la Cedeao se réuniront en sommet à Lomé. Des recommandations pour une sortie de crise sont très attendues.  Là encore, pouvoir et opposition tentent de tirer  le drap chacun de son côté. A Lomé II, le discours est presque le même : « le Togo est un Etat souverain, Faure Gnassingbé est un président élu. Il n’appartient pas à ses pairs de la CEDEAO de venir le déloger ou de lui imposer de ne pas être candidat en 2020 », glose un ministre conseiller du chef de l’Etat togolais, un pilier de la vieille garde.

L’opposition, elle, ou tout du moins la Coalition, se montre sereine. Pour Brigitte Adjamagbo-Johnson, présidente de la C14, « la CEDEAO n’irait que dans le sens de la volonté du peuple ». Jean Eklou, le leader de la jeunesse de l’Alliance nationale pour le changement (ANC), parti membre du regroupement des 14, met en garde contre le « tollé général » qu’il pourrait y avoir au cas où les recommandations de l’Organisation sous régionale ne seraient pas « conformes aux attentes du peuple togolais ».

C’est qui le peuple togolais ? A qui appartient le peuple ? Que veut ce peuple ?  C’est une difficile équation à résoudre pour Alpha Condé, Nana Akufo-Addo et leurs pairs de la sous-région. Mais déjà, Jean-Pierre Fabre est catégorique : « la CEDEAO ferait preuve d’une insoutenable légèreté aujourd’hui si elle proposait, encore une fois, après ce drame, que Faure Gnassingbé soit admis à se présenter pour un 4e mandat, contre la volonté de la majorité des Togolais, comme le confirme le sondage Afro-Baromètre rendu public récemment ». Bon à suivre…

Ambroise D.

 

 

 

Dialogue politique : les facilitateurs tiennent à la paix et la stabilité du Togo

À l’ouverture des discussions mercredi à l’hôtel du 2 Février à Lomé,  Alpha Condé et Nana Akufo-Addo ont salué les efforts déployés par les parties prenantes togolaises en vue du dénouement heureux de la situation que traverse le pays depuis dix mois.

Tout en exprimant leur satisfaction pour l’esprit qui a prévalu tout au long de ces discussions, les deux présidents disent avoir noté avec satisfaction la disponibilité des principaux acteurs de la crise à “œuvrer ensemble pour parvenir à un climat  sociopolitique décrispé et apaisé dans l’harmonie et la cohésion entre les différentes composantes de la société togolaise“.

Le communiqué final des travaux de ce mercredi montre clairement le prix que les deux hommes attachent à la paix et la stabilité au Togo et dans la sous-région ouest-africaine. Ainsi,  pour que la paix et la stabilité règnent au Togo, “les  facilitateurs invitent instamment tous les partis politiques et toutes les forces vives
togolaises à s’abstenir de tout acte et de tout agissement susceptible de constituer une menace à la paix et à la stabilité du Togo et de la sous-région“.

Pour cela,  ils appellent chaque partie à la retenue et demandent notamment au gouvernement de prendre certaines mesures allant de la libération des personnes arrêtées dans le cadre des manifestations politiques à la suspension du processus électoral jusqu’en novembre,  en passant par l’autorisation des manifestations  dans certaines villes du pays (Sokode,  Bafilo,  Mango,  ndlr) “dans le respect de l’ordre public”. La recherche des “armes emportées” lors des manifestations des 19 et 20 août reste également une priorité pour les deux facilitateurs qui en appellent à la collaboration des populations avec les autorités publiques.

La résolution de la crise politique togolaise ne se fera pas sans tenir compte de la paix et la stabilité qui doivent prévaloir dans le pays et par-delà dans l’espace communautaire. Couper la poire en deux,  voilà sans doute la difficile équation à résoudre par les chefs d’Etat et de gouvernement de la Cedeao qui se réunissent prochainement en sommet à Lomé.

Ambroise D.

Déterminée jusqu’au bout

Les partis membres de la Coalition des 14 (C14) sont déterminés à aller jusqu’au bout de leur lutte.  Alors que les manifestations de rue sont devenues une véritable pomme de discorde entre elle et le gouvernement,  la C14 a  trouvé le moyen de garder allumée  la flamme du combat pour l’alternance,  en attendant que les lignes bougent.

Ce dimanche,  elle organise des meetings d’information simultanément dans trois différents quartiers de Lomé.  L’annonce a été faite à travers un communiqué rendu public jeudi. Remerciant les populations togolaises pour “leur courage et détermination“, la coalition dirigée par Brigitte Kafui Adjamagbo-Johnson invite ses militants et sympathisants à prendre part massivement à ces rencontres,  “face au dilatoire et au refus du régime RPT/UNIR de respecter ses engagements en présence du facilitateur, notamment la mise en œuvre des mesures d’apaisement, l’arrêt des préparations unilatérales de consultations électorales ainsi que l’arrêt des persécutions , arrestations, poursuites à l’encontre des militants et dirigeants des partis politiques de l’opposition et de la société civile et aussi face la stagnation du dialogue”.

Ces meetings sont prévus à Baguida (Place publique), Avénou (Terrain CEG Avénou face Eglise Catholique), Agoè Zongo (Terrain Zongo face boutique AMI- AMI).

La coalition des 14 partis politiques compte sur la mobilisation massive et la présence de tous à ces différents points pour avoir les meilleures informations sur la situation actuelle.

Née des manifestations du 19 août 2017, la crise politique actuelle est un casse-tête pour la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) qui a confié sa gestion au président ghanéen, Nana Kufo -Addoh.  Mais depuis le 23 février, le dialogue intertogolais ouvert quatre jours plus tôt , sous l’égide du Ghanéen est au point mort.

 

Pour le moment, la montagne n’a accouché que d’une petite souris

Les Togolais doivent encore prendre leur mal en patience. Pouvoir et opposition ne sont pas encore prêts à se mettre d’accord sur l’essentiel. Seule chose à se mettre sous la dent à l’heure actuelle, la cessation du processus électoral, ainsi que l’a exigé la C14. “S’agissant de la demande de cessation du processus électoral unilatéralement conduit par le gouvernement, le Facilitateur a informé la Coalition de la décision des autorités togolaises d’y accéder. Cette information a été confirmée par la partie gouvernementale au Dialogue“, a déclaré la C14 devant la presse ce lundi. Petite victoire donc pour Brigitte Adjamagbo-Johnson et sa coalition.

Pour ce qui est des violences militaires à Kparataou, le facilitateur a, selon la C14, indiqué les enquêtes diligentées sur le terrain ont permis de relever dans la zone, une forte présence militaire qui est source de tension.

Mais au fond, les discussions ouvertes le 19 février dernier n’ont pas permis d’avancer sur les questions essentielles. En effet, le retour à la constitution originelle de 1992 était jusqu’ici la principale revendication de l’opposition togolaise. Une exigence que la coalition des 14 partis doivent abandonner au profit de la réintroduction des dispositions permettant d’adapter la loi fondamentale aux réalités du moment. Une révision constitutionnelle qui devrait bien se garder de comporter le bout de phrase “en aucun cas, nul ne peut exercer plus de deux mandats” considéré par le parti présidentiel comme une une volonté de l’opposition d’écarter la candidature de l’actuel président en 2020.

Face à cette impasse, la C14 propose une période de transition. “La coalition a proposé l’ouverture, après le rétablissement des dispositions fondamentales, d’une période de transition jusqu’à la prochaine élection présidentielle“, indique la coalition qui définit déjà les prérogatives des autorités au cours de cette période: “au cours de cette période, les autorités de transition auront en charge l’administration du pays, la mise en œuvre des réformes électorales et l’organisation consensuelle des prochaines élections locales, législatives et présidentielle“.

Le parti au pouvoir avalera-t-il cette pilule? L’opposition togolaise compte sur la médiation ghanéenne et l’implication des chefs d’État de la Cédéao pour ce faire. Mais en attendant, elle se dit prête à remuer de nouveau la rue.

Togo: un émissaire du président ghanéen rencontre la C14 cet après-midi

Cette visite du ministre ghanéen intervient au moment où le dialogue ouvert entre les acteurs politiques togolais le 19 février dernier est au point mort, et où des incompréhensions sont nées au sein de la coalition des 14 partis d’opposition quant à la reprise ou non des manifestations politiques.

Selon les indiscrétions, Albert Kan-Dapaah devrait écouter les premiers responsables de la coalition sur les mobiles qui expliqueraient une éventuelle reprise des manifestations alors même que le dialogue devrait se rouvrir très prochainement. Le messager de Nana Akufo-Addo pourrait, semble-t-il, aussi rassurer la C14 quant à la ferme volonté du président ghanéen d’œuvrer à la résolution de la crise politique actuelle, à travers le dialogue.

Alors que le Parti national panafricain (Pnp) a annoncé la reprise des manifestations entre le 20 et le 24 mars, le porte-parole de la coalition, Eric Dupuy, a déclaré dimanche 18 mars sur une radio de la place que le regroupement n’avait appelé les populations à « aucune manifestation ». Le responsable a ouvertement accusé le PNP de Tikpi Atchadam de violer les règles établies dans le groupe en allant « un peu trop vite en besogne ».

« La coalition n’a jamais publié un communiqué appelant à une manifestation. Cependant, la coalition a écrit à titre conservatoire au ministre de l’administration territoriale pour l’informer d’un projet de manifestation la semaine prochaine », a précisé Eric Dupuy.

Togo – Dialogue : comprendre les mécanismes de la médiation avec Me Tchassona-Traoré

Courrier d’Afrique : Me Tchassona-Traoré, qu’est-ce que la médiation?

Mouhamed Tchassona-Traoré: La médiation est une recherche ensemble, d’une solution juste et équitable pour résoudre un litige, avec l’aide d’une personne impartiale et neutre, à la satisfaction de toutes les parties. Pour enclencher le processus de médiation, le litige doit exister. Par contre l’utilisation des techniques du médiateur peut aider à éviter des conflits futurs et non encore existants. Ici le litige est compris au sens large du terme : on peut parler de litige dès lors qu’il existe des intérêts opposés entre deux ou plusieurs acteurs.

Chaque mot dans cette définition a, comme il se doit, son importance. L’analyse de cette définition met en valeur la médiation et sa spécificité. La médiation est une recherche qui suppose un chemin à parcourir ou un processus à suivre et une certaine activité, contrairement à d’autres modes de résolution de conflits dans lesquels les parties sont souvent soumises au processus de résolution, sans (inter)action personnelle.

Cette définition met en évidence l’implication des parties elles-mêmes dans la résolution de leur conflit, une des choses essentielles de la médiation.

La recherche, comprise dans cette définition, nécessite, de par l’interaction requise, aussi la libre volonté des parties de participer au processus de médiation, d’en accepter les règles et la volonté d’arriver à une solution : elle suppose une certaine motivation.

La médiation est une recherche ensemble dans laquelle ce sont les parties elles-mêmes, accompagnées du médiateur, qui vont chercher la solution à leur conflit. En plus, ce ne sont pas seulement les parties mêmes, mais ce sont les parties ensemble et, d’habitude, rassemblées qui vont faire le travail. C’est exactement ce rassemblement des parties dans un élan positif et cette nécessité de collaboration et de coopération qui permet une interaction constructive et donne sa valeur spécifique au processus de médiation. Jusqu’ici, la coalition comme la partie gouvernementale sont dans cette dynamique, même si l’exercice reste encore laborieux.

La solution ou les solutions retenues doivent être vérifiées quant à leur possibilité juridique et réelle, sans perdre de vue l’équité. L’équité ou la solution équitable est ce qui donne la grande liberté qu’ont les parties dans un processus de médiation : la solution ne doit en effet qu’être équitable à leurs yeux et pour leur situation concrète. Ceci veut dire que les parties ne sont pas nécessairement à la recherche d’une égalité stricte, qui limite les options possibles et la liberté de choisir.

La résolution du conflit peut se faire également avec l’aide d’une personne. La recherche avec la seule aide d’une personne et non par cette personne, reflète de nouveau l’implication personnelle des parties en cause et leur travail personnel dans la recherche de la solution à leur conflit.

Le travail du médiateur « se limite » à créer un cadre et à donner une structure aux parties afin de faciliter la recherche par les parties et de permettre que celle-ci soit active et constructive.

Le médiateur doit revêtir la double qualité d’une personne impartiale et neutre. L’impartialité et la neutralité se complètent et sont d’essentielles attitudes du médiateur afin de conserver la confiance qu’il doit recevoir des parties.

Pourtant cette impartialité et cette neutralité doivent être comprises dans un sens positif repris dans le mot multi-partialité de sorte que durant le processus de médiation, le médiateur prendra parfois partie pour l’un, parfois pour l’autre, tout en veillant à maintenir un équilibre comme de l’empathie, c’est-à-dire la capacité du médiateur de vivre l’histoire de la personne concernée comme celle-ci l’a vécue, de reconnaître le vécu, sans que cette empathie influence sa neutralité.

La satisfaction requise reflète la libre volonté des parties, si les parties ne sont pas satisfaites, il sera très difficile de les amener à travailler d’une manière constructive à la résolution de leur conflit. Il faut la satisfaction de toutes les parties et donc aussi des parties non-présentes, par exemples dans le cas de la crise togolaise, le peuple dans une large mesure.

Le médiateur veillera au respect des intérêts de toutes les parties concernées, sans prépondérance pour l’une ou l’autre partie.

CA : Et si on transpose tout ça dans le cas togolais, que peut-on retenir ?

MTT : Nous constatons dans l’exercice qui est le nôtre au Togo, une grande impatience et parfois du scepticisme chez nos compatriotes quant à l’aboutissement du processus en cours. Pourtant, nous pouvons, au regard du développement ci-dessus, affirmer sans l’ombre d’un doute, que le processus de dialogue et de la médiation tient le cap de l’espérance et de espoir de résolution pour peu que nous y croyions et donnions toute sa chance de réussite au médiateur dans la recherche de solutions équitables pour sortir de la crise.

CA : Quel doit être le rôle du médiateur dans tout ça?

MTT : Le rôle du médiateur est de créer un cadre, de donner une structure et d’informer, sans aviser. Ce cadre et cette structure spécifiques rendent possible une coopération, et si non une coopération, au moins un travail dans une même direction, ils facilitent la discussion et rétablissent le dialogue : le médiateur est parfois appelé « facilitateur»

Le médiateur va canaliser les émotions, sans les supprimer, rechercher les besoins réels en clarifiant ce que disent les parties et il va obliger les parties à s’écouter, et en s’écoutant à se comprendre : pourquoi l’autre dit ce qu’il dit, de la façon dont il le dit. La compréhension de la prise de position de l’autre et de la façon d’agir de l’autre, rend l’acceptation de la différence d’autant plus facile. Pourtant mener les parties à se comprendre, n’est pas les pousser à se réconcilier, la compréhension n’implique pas et ne nécessite pas l’accord : le médiateur ne recherche pas la (ré) conciliation, mais bien l’accord par l’écoute, la compréhension et le respect.

CA : Parlez-nous brièvement des différentes étapes du processus de médiation

MTT : Les différentes écoles utilisent différents modèles, toutefois il existe des points de similitude. Le processus de médiation commence dans un premier temps par une courte évaluation de la situation afin de déterminer si le problème est abordable par la médiation et par le médiateur en question. Ensuite par l’installation du cadre dans lequel se déroulera la médiation : les explications quant à la médiation même sont données, les règles à suivre par les parties sont expliquées, un accord est atteint entre le médiateur et les parties en conflit.

La vérification de la prise de décision, suivie par la recherche des besoins réels des parties est aussi une étape importante du processus de médiation.

Mais le gros travail est fait lorsque les besoins réels des parties sont clairement cernés ( les revendications de la coalition et les réponses du gouvernement) et une liste d’options possibles est établie. Le choix de l’option ou des options à retenir se fait en comparaison aux besoins des parties. In fine, après le choix final les accords sont conclus et actés.

CA : La médiation a-t-elle une valeur, une utilité ? Si oui, laquelle ?

MTT : La question sur l’utilité de la médiation ne demande pas beaucoup d’explications, vu que le simple fait d’avoir une « nouvelle » ou une autre façon de gérer un conflit, à côté des manières déjà existantes, suffit pour confirmer son utilité, il y a assez de conflits pour permettre la réflexion sur la gestion de conflits en général et l’élaboration de nouveaux modes de gestion.

Confirmer le contraire serait dire qu’il existe déjà suffisamment de modes de gestions de conflit et qu’il n’en faut pas d’autres… ! C’est plutôt par l’analyse de la spécificité de la médiation que l’on peut se rendre compte de sa valeur et de l’importante place qu’elle pourrait prendre.

D’abord la libre volonté et la nécessité d’une implication personnelle responsabilisent les parties et leur permettent de tenir ou de reprendre les choses en main :

Ensuite, la recherche d’une certaine tranquillité (peace of mind), à une époque où rien ne va assez vite, renvoie directement à la médiation, qui permet la recherche non-violente d’une solution ressentie comme équitable par tous dans un laps de temps relativement réduit, ce qui renvoie à une autre caractéristique non-négligeable de la médiation : le coût et la durée de la médiation. Le coût et la durée du processus de médiation sont habituellement réduits, surtout quand on les compare aux autres modes de résolution de conflits (les pertes matérielles et en vies humaines dans les conflits armés et revendications révolutionnaires)

Par ailleurs l’accord par l’écoute, la compréhension et le dialogue rend la solution retenue non seulement plus facile à respecter, surtout si ce n’est pas du tout ce qu’une ou les différentes parties avaient imaginé comme la/leur solution idéale au conflit, mais la rend aussi défendable vis-à-vis des tiers mentionnés plus haut. La solution finale aura en effet été choisie par les parties-mêmes, en connaissance (approfondie) de cause.

 

Nana Akufo-Addo : « Chaque année, plus de 50 millions de dollars sont détournés en Afrique par des dirigeants pour les envoyer en Occident »

La conférence mondiale pour l’éducation a pris fin samedi dernier, au Sénégal. Au cours des panels, le président ghanéen Nana Akufo-Addo a parlé avec son cœur pour interpeller les dirigeants africains. Il ne veut pas que les Africains continuent de tendre la main aux autres pays. « Nous ne devons pas compter sur les autres pour changer notre système. Si on se met derrière les autres pays pour apporter des modifications par rapport à notre système éducatif, nous serons toujours obligés de les suivre », dit-il.

De l’avis du président Ghanéen, il faut apporter des modifications à notre système à chaque fois qu’ils changent des perceptions. « Je ne dis pas que les financements ne sont pas bons, mais on doit pouvoir nous financer et développer notre propre système éducatif de qualité », a-t-il ajouté. Pour Nana Addo, chaque année, plus de 50 millions de dollars sont détournés en Afrique par des dirigeants pour les envoyer en Occident » se plaint-il. « La prochaine fois, si nous devons revenir en Afrique, je veux que ça soit non pas pour voir le financement de l’Afrique, mais plutôt pour voir la qualité de l’enseignement en Afrique » conclue le chef de l’Etat ghanéen. Pour dire vrai, le discours du président ghanéen, Nana Addo, marquera les esprits.

Met Gaye (Correspondant à Dakar)