Togo: On balise la voie pour le 31 juillet

Les facilitateurs de la CEDEAO l’ont dit et redit: il faut autoriser les manifestations de l’opposition dans les villes en état de siège de fait depuis plusieurs mois.  À partir du 20 juillet,  la coalition de l’opposition expérimentera pour la première fois cette liberté retrouvée dans les villes de Sokodé,  Tchamba,  Bafilo et Mango.

L’autre exigence de Nana Akufo-Addo et Alpha Condé reste la libération de toutes les personnes arrêtées et jetées en prison dans le cadre des manifestations de l’opposition.  Même s’ils sont encore nombreux dans les geôles,  Faure Gnassingbé a accordé mardi la liberté provisoire à de 12 détenus et une remise de peine à 7 autres dans trois centres carcéraux du Togo.  Une grâce présidentielle qui s’analyse comme un signe de bonne volonté pour décanter la crise qui secoue le pays depuis le 19 août.

Dans la foulée,  on annonce pour jeudi une rencontre entre la Coalition présidée par Brigitte Adjamagbo-Johnson et la Commission de la CEDEAO,  en vue de la réouverture du dialogue inter-togolais.

De part et d’autre,  on note une volonté de voir enfin se terminer le statu quo. D’un côté,  le gouvernement se dit “prêt à opérer les réformes“, ainsi que l’a rappelé le ministre Octave Nicoué Broohm.  De l’autre,  la Coalition de l’opposition s’est montrée très prudente en maintenant ses manifestations d’avant le sommet de la Cedeao,  malgré la “désolidarisation” du PNP de Tikpi Atchadam pour des raisons que la C14 dit comprendre tout de même.

Reste à présent que les recommandations qui seront issues de la rencontre des chefs d’État et de gouvernement de l’espace sous-régional soient acceptées et respectées par les deux parties.  Car comme l’a dit l’ambassadeur de France près le Togo,  Marc Vizy, “les recommandations de la CEDEAO sont déterminantes pour le Togo“.

Togo: Les manifestations de la coalition de l’opposition reportées à la semaine prochaine

Comme dans son premier communiqué, le regroupement dirigé par Brigitte Kafui Adjamagbo-Johnson félicite les facilitateurs de la Communauté économique des États d’Afrique de l’ouest qui, “dans leur communiqué du 27 juin 2018, ont invité le gouvernement à garantir le droit et la liberté de manifester en toute sécurité sur l’ensemble du territoire national.”

Sans renoncer à la série de manifestations annoncées, la C14 réaménage le calendrier de celles-ci “en raison de contraintes d’agenda“. Ainsi, Brigitte Kafui Adjamagbo-Johnson et les autres leaders de la coalition se rendront au chevet des détenus de la prison civile de Lomé le mercredi 18 juillet puis à la prison de Kara et celle de Sokodé le jour suivant.

Les meetings d’information et de sensibilisation, eux, démarrent le vendredi 20 à Mango pour se terminer le 28 à Kpalimé, en passant par Bafilo, Sokodé, Lomé, Tsévié et Atakpamé.
Le message sera le même dans toutes les localités: le retour à la constitution de 1992 dans sa version originelle, les réformes institutionnelles, la révision du cadre électoral y compris le droit de vote des Togolais de la diaspora.
La libération des manifestants arrêtés dans l’exercice de leur droit constitutionnel et la levée de l’État de siège de fait des villes de Mango, Bafilo, Sokodé, Tchamba, Kara et des quartiers de Lomé, l’arrêt immédiat des rafles dans les quartiers de Lomé et sur toute l’étendue du territoire et le retour des réfugiés et des déplacés, sont également les sujets qui seront abordés lors de ces rencontres d’échanges entre les responsables de la C14 et les populations.

Crise togolaise – France, CEDEAO, pouvoir et C14 : un vrai cocktail indigeste

L’appel de la C14

«Togolaises et Togolais des villes de Mango, Bafilo, Sokodé, Lomé, Tsévié, Atakpamé et Kpalimé, Organisations de défense des droits de l’Homme, associations de presse, syndicats et associations de la société civile, travailleurs des secteurs publics et privés, revendeuses des marchés, taximen, zémidjans, étudiants, munis de drapelets togolais, une fois encore, soyons tous au rendez-vous les 13, 14, 21, 28 et 29 juillet 2018 aux lieux des meetings pour recevoir les informations appropriées au renforcement de votre détermination ».

C’est par ces mots que la Coalition des 14 partis de l’opposition togolaise a appelé mardi à la reprise de ses manifestations, pour exiger le retour à la Constitution originelle de 1992, les réformes institutionnelles, la révision du cadre électoral y compris le droit de vote des Togolais de la diaspora, la libération des manifestants arrêtés dans l’exercice de leur droit constitutionnel et la levée de l’état de siège de fait dans les villes de Mango, Bafilo, Sokodé, Tchamba, Kara et des quartiers de Lomé, l’arrêt immédiat des rafles dans les quartiers de la capitale et sur toute l’étendue du territoire et le retour des réfugiés et des déplacés.

Boukpessi et le « risque d’une crise institutionnelle »

L’appel à manifester à Sokodé, Bafilo, Tchamba et Mango, quatre villes en état de siège de fait, va-t-il être couronné de succès ? On ne connait pas pour l’heure la position du ministre en charge de l’Administration territoriale. En revanche, on sait ce que pense Payadowa Boukpessi des élections législatives. « Nous courons le risque d’une crise institutionnelle si nous n’organisons pas les élections législatives au Togo avant la fin de l’année 2018 », a déclaré le ministre samedi lors du symposium de la jeunesse organisé à Kara, en marge de la fête traditionnelle Evala.

Ces propos de Payadowa Boukpessi sonnent dans les oreilles des opposants au pouvoir de Lomé comme la « confirmation de la volonté du régime de faire un passage forcé ». « Ce n’est pas étonnant que Boukpessi dise ces choses, puisque cela va dans le fil droit de ce qu’a déjà dit la Cour Constitutionnelle d’Aboudou Assouma aux ordres du prince », a analysé un des responsables de la Coalition.

Qu’est-ce donc qu’une crise institutionnelle ? Me Zeus Atta Messan Ajavon persiste et signe : « le vide constitutionnel n’existe pas ! ». Le ministre et le professeur de Droit parlent-ils de la même chose ?

Macron, le statut quo et le Nigeria

S’exprimant récemment sur la situation politique togolaise, Emmanuel Macron a indiqué que « le statut quo n’est plus possible pour le Togo ». Un bout de phrase interprété par chaque camp selon que cela l’arrange. Pour les partisans du pouvoir, le statut quo signifie la crise actuelle née le 19 août 2017 et « alimentée par l’opposition ». Tandis que dans les rangs de l’opposition, ces propos du président français résonnent comme la « lassitude d’un chef d’Etat français de voir la même famille biologique diriger tout un pays pendant un demi-siècle ».

En tous les cas, le président français compte bien proposer un schéma de sortie de crise qui implique le Nigeria en pole position. “Le président (Muhammadu, ndlr) Buhari entre en période électorale,  et je pense que le Nigeria aura,  après cette période électorale,  un rôle important à jouer à la solution de cette crise “, avait-il déclaré ajoutant que “la France viendra en soutien de ces solutions portées par les chefs d’État africains et l’Union africaine“.

Un politologue togolais, qui a requis l’anonymat, coupe la poire en deux : « Par cette déclaration, Emmanuel Macron veut juste rappeler au Nigeria que la France a la main sur la crise togolaise. Une façon d’éteindre les déclarations tapageuses de Buhari et lui dire que le Nigeria ne peut agir dans la crise togolaise que dans le périmètre que la France aura aménagé pour les acteurs régionaux ». « Entendons-nous bien, les élections au Nigeria, c’est en 2019. Est-ce à dire que les Togolais vont devoir attendre d’ici là ? Moi je pense que la solution à la crise togolaise n’est pas extérieure. Il faut nécessairement une stratégie interne qui sera appuyée par l’extérieur », propose-t-il.

Vivement les recommandations de la CEDEAO !

Les 30 et 31 juillet, les chefs d’Etat et de gouvernement de la Cedeao se réuniront en sommet à Lomé. Des recommandations pour une sortie de crise sont très attendues.  Là encore, pouvoir et opposition tentent de tirer  le drap chacun de son côté. A Lomé II, le discours est presque le même : « le Togo est un Etat souverain, Faure Gnassingbé est un président élu. Il n’appartient pas à ses pairs de la CEDEAO de venir le déloger ou de lui imposer de ne pas être candidat en 2020 », glose un ministre conseiller du chef de l’Etat togolais, un pilier de la vieille garde.

L’opposition, elle, ou tout du moins la Coalition, se montre sereine. Pour Brigitte Adjamagbo-Johnson, présidente de la C14, « la CEDEAO n’irait que dans le sens de la volonté du peuple ». Jean Eklou, le leader de la jeunesse de l’Alliance nationale pour le changement (ANC), parti membre du regroupement des 14, met en garde contre le « tollé général » qu’il pourrait y avoir au cas où les recommandations de l’Organisation sous régionale ne seraient pas « conformes aux attentes du peuple togolais ».

C’est qui le peuple togolais ? A qui appartient le peuple ? Que veut ce peuple ?  C’est une difficile équation à résoudre pour Alpha Condé, Nana Akufo-Addo et leurs pairs de la sous-région. Mais déjà, Jean-Pierre Fabre est catégorique : « la CEDEAO ferait preuve d’une insoutenable légèreté aujourd’hui si elle proposait, encore une fois, après ce drame, que Faure Gnassingbé soit admis à se présenter pour un 4e mandat, contre la volonté de la majorité des Togolais, comme le confirme le sondage Afro-Baromètre rendu public récemment ». Bon à suivre…

Ambroise D.

 

 

 

Togo: la coalition des 14 répond à Boukpessi et réitère son appel à manifester

En conférence de presse ce mardi à Lomé, les 14 partis membres de la coalition ont vigoureusement réagi à la dernière note de Payadowa Boukpessi relative à la série de manifestations prévues les 6, 7 et 9 juin. Pour la C14, le gouvernement fait preuve de mauvaise foi en invoquant le dialogue en cours comme argument valable devant induire la suspension des manifestations de l’opposition.

Se fondant sur une interprétation tendancieuse et volontairement erronée, d’un souhait émis par le facilitateur de voir la Coalition suspendre les manifestations pour donner une chance au dialogue censé durer 10 jours, le gouvernement, après avoir échoué à interdire ouvertement les manifestations pacifiques de l’opposition, a cru devoir en modifier unilatéralement les itinéraires en violation de la constitution et de la loi sur la liberté de manifestation“, a déclaré la coalition devant la presse.

La Coalition dénonce avec fermeté ce changement “illégal et injustifié des itinéraires“, qui, à ses yeux, relève “d’une stigmatisation de la population togolaise et la violation de ses droits“. Pour cette raison, elle n’entend pas capituler face à ce qu’elle considère comme la violation des droits constitutionnels des Togolais et des lois de la République, en l’occurrence celle fixant les conditions d’exercice de la liberté de réunion et de manifestations pacifiques publiques.

En conséquence, Brigitte Adjamagbo-Johnson et ses confirment leur appel à manifester pacifiquement les 6, 7 et 9 juin 2018 à Lomé et sur toute l’étendue du territoire national suivant les itinéraires qu’ils ont eux-mêmes définis.

Réagissant par ailleurs à la forte présence militaire dans les rues de la capitale, les quatorze partis rappellent  aux forces de sécurité et de défense “qu’investir les lieux de rassemblement, c’est se mettre hors la loi“, leur mission étant “de protéger le libre exercice des droits et des libertés, et de garantir la sécurité des citoyens et de leurs biens“.

Ambroise D.

 

Déterminée jusqu’au bout

Les partis membres de la Coalition des 14 (C14) sont déterminés à aller jusqu’au bout de leur lutte.  Alors que les manifestations de rue sont devenues une véritable pomme de discorde entre elle et le gouvernement,  la C14 a  trouvé le moyen de garder allumée  la flamme du combat pour l’alternance,  en attendant que les lignes bougent.

Ce dimanche,  elle organise des meetings d’information simultanément dans trois différents quartiers de Lomé.  L’annonce a été faite à travers un communiqué rendu public jeudi. Remerciant les populations togolaises pour “leur courage et détermination“, la coalition dirigée par Brigitte Kafui Adjamagbo-Johnson invite ses militants et sympathisants à prendre part massivement à ces rencontres,  “face au dilatoire et au refus du régime RPT/UNIR de respecter ses engagements en présence du facilitateur, notamment la mise en œuvre des mesures d’apaisement, l’arrêt des préparations unilatérales de consultations électorales ainsi que l’arrêt des persécutions , arrestations, poursuites à l’encontre des militants et dirigeants des partis politiques de l’opposition et de la société civile et aussi face la stagnation du dialogue”.

Ces meetings sont prévus à Baguida (Place publique), Avénou (Terrain CEG Avénou face Eglise Catholique), Agoè Zongo (Terrain Zongo face boutique AMI- AMI).

La coalition des 14 partis politiques compte sur la mobilisation massive et la présence de tous à ces différents points pour avoir les meilleures informations sur la situation actuelle.

Née des manifestations du 19 août 2017, la crise politique actuelle est un casse-tête pour la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) qui a confié sa gestion au président ghanéen, Nana Kufo -Addoh.  Mais depuis le 23 février, le dialogue intertogolais ouvert quatre jours plus tôt , sous l’égide du Ghanéen est au point mort.

 

Togo: la suspension des manifestations maintenue jusqu’à la reprise du dialogue

Nous vous informions hier lundi que le ministre ghanéen de la Sécurité, Albert Kan-Daapah, émissaire du président ghanéen Nana Akufo-Addo, a de nouveau échangé avec les leaders de la coalition des 14 partis politiques de l’opposition togolaise. Au menu des discussions, la reprise très prochainement du dialogue politique actuellement au point mort. « Nous avons reçu le message que le ministre ghanéen est venu nous délivrer. Il y a une perspective très proche d’évolution du processus du dialogue. Je suis confiante que les choses vont bouger la semaine prochaine », a confirmé mardi la coordinatrice de la C14, Brigitte Kafui Adjamagbo-Johnson sur une radio locale.

Ainsi, pour donner une chance à ce dialogue qui devrait reprendre la semaine prochaine, la coalition des 14 est invitée à maintenir la suspension de ses manifestations. « Je prie nos compatriotes de garder patience encore pour un tout petit peu de temps. Les choses vont bouger », ajoute Mme Johnson qui toutefois met en garde contre tout calcul politicien visant à “faire traîner les choses pour freiner la détermination des populations“.

Cet appel de la médiation ghanéenne suivi par la coalition des 14 prend ainsi le contre-pied du Parti National Panafricain (Pnp) de Tikpi Atchadam qui avait annoncé la reprise des manifestations pour compter de ce mardi 20 mars.